LE BAROMETRE
Edito

Attendre Justice

mercredi 7 janvier 2009 par Octave Lemiale

L’EMPATHIE POUR LE DETENU n’existe pas. Certes, ce sentiment est-il réservé à sa famille, à son avocat aussi, qui jure d’exercer son métier avec humanité. « Tant pis pour eux » sera probablement toujours le maître mot. Cela signifie t-il, toutefois, que dans l’une des sociétés les plus modernes du monde, les droits fondamentaux s’arrêtent à la porte des prisons ? « Attendre justice » est la devise qui trône dans le bureau d’Hughes de Suremain, à l’Observatoire International des Prisons. Nous en faisons la nôtre. Qu’est-ce qui justifie en effet qu’un individu, même dangereux, ne soit plus titulaire de droits fondamentaux ? Serait-ce parce qu’il a fauté ? Dans ce cas, le spectre de la justice privée, que le système pénal cherche à éviter, n’est pas très loin.

« Attendre justice », un objectif classique, mais essentiel en prison. Le détenu est encore largement soumis au pouvoir discrétionnaire du Directeur de prison, qui lui-même doit faire face à sa hiérarchie. Comptable du bon fonctionnement de la prison, il n’est pas rare que le pouvoir dégénère en abus. Ainsi a-t-on vu un détenu puni à 45 jours d’isolement total, pour avoir tenté de se suicider… Isolement où il a fini par réussir son coup. Le système a besoin de garde-fous : d’une définition des droits fondamentaux dont est privé le détenu ; d’une procédure impartiale visant à faire respecter ceux dont il est titulaire. Et partant, d’un avocat.

Les détenus ne doivent plus jamais dire, comme Hugo, « routard » de la prison française (interview page 16) qu’une fois à l’intérieur d’une prison, l’avocat ne sert à rien. Au contraire, l’avocat doit servir à faire respecter ses droits, qui continuent d’exister dans l’enceinte carcérale.

De même que l’avocat s’assure que les procédures - rationalisant la haine populaire - sont respectées jusqu’au verdict, il doit s’assurer que les phénomènes d’abus de pouvoir et autres dérapages ayant lieu après le verdict sont sanctionnés.

C’est l’esprit du projet de loi pénitentiaire que nous présentons (lire ci-contre). Le travail du législateur s’avère toutefois insatisfaisant (article page 22), malgré un sentiment de satisfaction des contrôleurs généraux (interview page 20). Peut-être est-ce lié au fait que l’administration pénitentiaire serait elle-même l’auteur du texte ?

Justice et droit en prison doivent faire bon ménage si l’on croit aux progrès de la civilisation et de la conscience. Ce, d’autant que la prison a pour objectif, avec celui de punir et d’amender, de resocialiser. N’est-ce pas à un gage de resocialisation que d’assurer, comme tout autre citoyen, la protection de ses droits fondamentaux ?

Octave Lemiale, promotion Abdou DIOUF, série J


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